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Combiner le chômage avec une activité de freelance

Dernière mise à jour : @September 13, 2022

Si vous vous apprêtez à passer freelance, il est probable que vous exerciez la même activité auparavant, en CDI. Vous avez donc cotisé pour le chômage, et vous pouvez en bénéficier en complément de votre nouvelle activité de freelance. Financièrement, il serait dommage de passer à côté d’environ 50k€ d’allocations sur 2 ans, et puis bien sûr si tout ne se passe pas comme prévu vous serez content d’avoir ce matelas sur lequel compter le temps de trouver une mission !

🎄 Comment avoir droit au chômage ?

Même si vous avez cotisé, il faut un élément déclencheur pour ouvrir vos droits Pôle Emploi :

  • Un licenciement, une fin de période d’essai à l’initiative de l’employeur, ou un non-renouvellement de CDD.
  • La rupture conventionnelle, qui est une fin du contrat de travail d’un commun accord entre l’employeur et le salarié. C’est l’option la plus simple, mais de nombreux employeurs ne l’acceptent pas parce qu’ils doivent alors payer les indemnités de licenciement (environ une semaine de salaire par année d’ancienneté), et ils ne souhaitent pas que d’autres salariés aient l’impression que cette “porte vers le chômage” est accessible.
  • L’abandon de poste, qui n’est clairement pas l’option préférable. En bref, vous n’allez plus au travail, et votre employeur peut alors décider de vous licencier pour faute simple ou faute grave. S’il y a faute grave, vous ne toucherez pas vos indemnités de licenciement, mais dans les deux cas le licenciement ouvre les droits au chômage. Toutefois, lorsque vous abandonnez votre poste, votre employeur peut suspendre votre salaire, sans nécessairement vous licencier. Ainsi, il peut laisser traîner cette situation et en attendant vous n’avez plus de revenus. L’employeur n’y gagne pas grand-chose, mais on peut imaginer qu’il n’ait pas envie de vous verser les indemnités de licenciement, de lancer les démarches pour le licenciement pour faute grave, ou tout simplement “par principe”.
  • La démission légitime. Il existe un certain nombre de cas dans lesquels la loi considère que la démission d’un salarié est légitime, et qu’elle permet d’ouvrir les droits Pôle Emploi.
  • La démission pour création d’entreprise. C’est possible depuis 2019, mais les conditions sont strictes : il faut avoir travaillé de manière continue durant 5 ans (sauf pendant les vacances bien sûr ! L’idée est de dire que vous avez cotisé chaque mois les 5 dernières années), et le sérieux du projet doit être validé par la commission paritaire interprofessionnelle régionale.

Si aucune option ne semble possible dans votre cas, creusez notamment les cas de démission légitime et demandez-vous si vous ne pourriez pas vous arranger pour être dans cette situation. Par exemple, certaines personnes exploitent le cas de la “démission après 3 années d’affiliation sans interruption, suivie d’un CDI auquel l'employeur met fin dans les 65 premiers jours travaillés”, en trouvant quelqu’un dans leur entourage qui accepte de les embaucher pour une courte période après qu’ils aient démissionné de leur emploi.

🤑 Combien gagne-t-on au chômage ?

Les indemnités brutes sont calculées par rapport au salaire brut moyen sur les deux dernières années. Les modes de calcul diffèrent en fonction des cas, mais vous toucherez en général 57% du brut.

Si vous aviez un salaire de plus de ~4500€ brut par mois avant d’être au chômage (en moyenne sur les deux dernières années), alors à partir du 7ème mois d’indemnités l’allocation chômage sera réduite à environ 2600€ brut maximum. Si vous touchiez plus de ~6400€ brut, alors elle sera réduite de 30%.

Vous pouvez utiliser le simulateur de Pôle Emploi pour estimer vos allocations plus précisément :

La durée de l’indemnisation correspond à peu près au nombre de jours travaillés sur les deux années qui précèdent la fin du dernier contrat de travail. Si vous aviez travaillé pendant deux ans avant d’être au chômage, vos allocations dureront deux ans.

Si vous avez perçu une indemnité compensatrice de congés payés, l'ARE commence à être versée seulement après un délai proportionnel au nombre de jours d’ARE que cette indemnité représente.

Les indemnités sont soumises à des retenues sociales (CSG, CRDS, retraite complémentaire) qui dépendent du montant de vos allocations mais peuvent être de l’ordre de 10%, ainsi qu’à l’impôt sur le revenu.

Lorsque vous rencontrez votre conseiller Pôle Emploi et que vous expliquez votre projet de création d’entreprise, on vous donne le choix entre deux modes de versement des allocations : l’ARE et l’ARCE.

Option #1 : l’Aide au Retour à l’Emploi (ARE)

C’est le mode de fonctionnement le plus courant. À la fin de chaque mois (à partir du 28), vous vous connectez sur le site de Pôle Emploi afin d’indiquer si vous avez travaillé ce mois-ci, si vous avez retrouvé un emploi, si vous avez gagné de l’argent, etc. On dit que vous “pointez”.

Si vous êtes créateur d’entreprise et que vous choisissez l’ARE, vous êtes placé en “catégorie 5”, ce qui signifie que vous n’êtes pas disponible immédiatement ; vous serez convoqués moins souvent, et vous n’aurez pas à justifier d’éventuelles démarches de recherche d’emploi (logique, vous vous concentrez sur votre entreprise).

Si jamais vous gagnez de l’argent avec votre activité de freelance alors que vous percevez l’ARE, vous devez le déclarer à la fin du mois. En fonction des cas, cela peut réduire votre allocation :

  • Si la société a été créée avant votre inscription à Pôle Emploi et que cela a donné lieu à une rémunération, vous pourrez cumuler intégralement les revenus de la société et l'allocation chômage. Toutefois le cumul ne peut pas dépasser votre ancien salaire.
  • Si la société a été créée après l’inscription à Pôle Emploi, vous devez retirer 70% de la rémunération de votre activité de freelance pour obtenir vos allocations Pôle Emploi du mois. Encore une fois, le cumul ne peut pas dépasser votre ancien salaire. Si par exemple vous avez une indemnité journalière Pôle Emploi de 60€ soit environ 1800€ par mois, et que votre société vous a rapporté 1000€ un mois donné, Pôle Emploi vous versera 1800 - (1000 * 70%) = 1100€ pour ce mois. Les jours d’allocation non versés ne sont pas supprimés, ils sont décalés et permettront d’allonger la durée des indemnités (elles peuvent donc durer plus de 2 ans).

Option #2 : l’Aide à la Reprise ou à la Création d’Entreprise (ARCE)

Cette option permet de toucher une partie de ses allocations sous forme de “capital”. Plutôt que de recevoir des allocations tous les mois, Pôle Emploi réalise deux versements de 22,5% du total des droits ARE qui restent à verser. Le premier versement a lieu dès l’exercice de l’option ARCE, et le deuxième 6 mois plus tard, à condition que la société existe toujours (il suffit généralement de montrer un Kbis à jour pour le déclencher). Au maximum, c’est donc l’équivalent de 11 mois d’ARE (45% de deux ans d’allocations) qui sont versés en deux fois.

Attention, cette option nécessite que la société soit créée après votre inscription à Pôle Emploi, donc après le premier rendez-vous avec votre conseiller !

À l’issue de ces deux virements, il est possible de repasser en ARE pour toucher le restant de ses droits (les 13 mois restant si vous aviez 2 ans d’allocation à la base). Pour ceci, il faut arrêter l’activité - Pôle Emploi demandera par exemple la preuve de la radiation de votre entreprise. Par contre, vous ne serez plus en “catégorie 5” puisque vous n’aurez plus de projet de création/reprise d’entreprise, vous devrez donc rendre des comptes sur votre recherche d’emploi. Il est toujours possible d’expliquer que vous allez créer une nouvelle société mais cela peut être accepté différemment en fonction des personnes qui s’occupent de votre dossier…

La particularité de l’ARCE est aussi que dès le premier versement, vous cessez d'être inscrit sur la liste des demandeurs d'emploi. Vous n’êtes plus chômeur ! Vous ne pouvez donc pas être convoqué, vous n’avez pas besoin de pointer chaque mois, et vos allocations ne sont pas réduites si vous touchez un revenu avec votre entreprise (vous pouvez même dépasser votre ancien salaire).

💁 L’aide à la création ou à la reprise d’entreprise (Acre)

Difficile de s’y retrouver avec tous ces acronymes qui se ressemblent, mais l’ARCE et l’Acre sont deux choses très différentes. L’Acre n’est pas une option de versement des allocations, mais une exonération partielle de charges sociales au début de la vie de l’entreprise. Elle est accessible dans plusieurs situations, notamment dans le cas où le créateur d’entreprise est au chômage.

Avec l’Acre, vous êtes exonéré d’assurance maladie, maternité, invalidité, décès, de prestations familiales et d’assurance vieillesse de base. Il reste toujours la CSG, la CRDS et quelques autres charges, mais vos charges sociales sont tout de même réduites de l’ordre de 2/3.

Cette exonération s’applique en totalité sur les revenus inférieurs à environ 30k€, elle est partielle pour les revenus entre environ 30k€ et 41k€, et il n’y a pas d’exonération au-delà. Elle dure 12 mois.

Si jamais vous êtes en auto-entreprise, l’Acre n’est pas automatique et il faut en faire la demande dans les 45 jours qui suivent le dépôt du dossier de création. Dans les autres cas, il n’y a pas de demande à effectuer.

✌️ Toucher le chômage en parallèle du freelancing

Cas #1 : vous pouvez vivre 2 ans avec les allocations mensuelles → ARE

Si vos allocations mensuelles de Pôle Emploi vous suffisent pour vivre pendant 2 ans, vous pouvez reporter les revenus de votre activité de freelance pour ne pas les toucher pendant 2 ans, et ainsi toucher l’intégralité de vos indemnités - c’est le cas idéal.

Pour ce faire, on garde tout le chiffre d’affaires généré au chaud dans la société, sans se verser de salaire. À la fin de l’année lors du bilan, un bénéfice important sera calculé. Plutôt que de vous verser ce bénéfice en dividendes, vous les affecterez au report à nouveau. C’est une façon comptable de dire que vous déciderez plus tard de ce que vous en ferez. Dès que les allocations chômage seront terminées, vous pourrez alors (si vous le souhaitez) vous verser la totalité en dividendes.

Quelques astuces pour compléter les allocations sans les réduire :

  • Pensez à vous rembourser les frais que vous auriez engagés à titre personnel avant la création de la société. Même s’ils ne sont pas indiqués dans vos statuts, c’est possible. Vous pouvez remonter jusqu’à 6 mois en arrière, à condition d’avoir les factures. Idéalement, elles doivent indiquer la mention “au nom et pour le compte de la société en formation” avec le nom de votre future société.
  • En début d’activité, votre société peut vous racheter votre matériel personnel : ordinateur, téléphone, bureau, etc.
  • Si vous domiciliez votre société à votre domicile, elle peut vous verser un loyer et rembourser une partie de vos charges. N’hésitez pas à consulter notre article sur le sujet !
  • Et bien sûr, tout au long de l’année vous pouvez passer un certain nombre de choses en frais de société.

Puisqu’on parle de se payer en dividendes, il est plus intéressant dans ce cas de créer une SASU qu’une EURL, comme décrit dans notre étude comparative. Il sera toujours possible si vous le souhaitez de transformer la SASU en EURL à l’issue des 2 ans d’ARE.

Pas d’inquiétude pour votre protection sociale liée à l’absence de rémunération, puisque vous cotisez sur votre ARE, donc vous bénéficiez d’une couverture sociale au titre de la maladie, maternité, invalidité, de prestations familiales et d’une couverture retraite.

Cas #2 : vous ne pouvez pas tenir avec les allocations mensuelles → ARCE

Vos allocations mensuelles de Pôle Emploi peuvent ne pas vous suffisent pas pour vivre, ou vous avez peut-être tout simplement envie de profiter immédiatement de l’augmentation de revenus liée au passage en freelance.

Choisissez alors l’ARCE, ce qui permettra de toucher tout de même 45% de vos allocations, tout en vous versant un salaire avec votre société en parallèle. Grâce à l’Acre (prérequis à l’ARCE), vous bénéficierez également d’une exonération partielle de cotisations sociales sur votre première année d’activité.

Attention : il faut pour l’ARCE que la société soit créée après votre premier rendez-vous avec le conseiller Pôle Emploi. Il peut donc y avoir un « trou » entre la fin de votre CDI et le début de l’activité freelance : jusqu’à 1 mois d’attente pour le rendez-vous Pôle Emploi + délai de création d’entreprise (2 semaines si tout se passe bien) + temps de signature du contrat entre votre client et cette nouvelle société.

📉 Et si mon activité s’arrête ?

Si malgré vos efforts votre société ne se porte pas bien et que vous devez arrêter l’aventure freelance, quelques options sont à votre disposition suite à la fermeture de votre entreprise :

  • Si vous n’aviez pas épuisé vos droits aux allocations chômage, vous pouvez en bénéficier à nouveau en cas de réinscription et dès lors que vos droits ne sont pas déchus (délai de 3 ans + la durée de votre indemnisation initiale).
  • Si vous avez épuisé vos droits ou qu’ils sont déchus, vous pouvez aussi demander l’ATI (Allocation des Travailleurs Indépendants), qui correspond à une indemnisation de 800€ par mois pendant 6 mois.

De nombreuses conditions s’appliquent, notamment sur les raisons ayant mené à l’arrêt de votre activité, alors prenez le temps de les étudier.

💡 Pour en savoir plus

De nombreux sites proposent des articles sur le sujet (un de plus avec nous), mais en cas de doute tenez-vous-en aux sources officielles :

Si vous êtes déjà inscrit à Pôle Emploi, vous pouvez aussi contacter votre conseiller pour lui poser des questions.